Le temple de Mater Matuta sauvé par un prodige terrifiant

     Nous sommes en - 377. Les Latins sont à l'époque un peuple bien distinct des Romains, contre qui ils sont en guerre.
    Pistes d'étude :
  1. L'origine diverse des familles romaines : les Tarquins, par exemple, sont étrusques. Il semble que les patriciens d'époque républicaine se rappellent encore leur peuple d'origine.
  2. Les voix surnaturelles sont très fréquentes dans les prodigia. On peut citer chez Tite Live xxi, 62, des nourissons ou des animaux qui se mettent à parler et chez les grecs, l'interprétation comme parole du bruit du vent dans les chênes de Dodone.
  3. Etudier le comportement des armées qui entrent dans une ville. En cas de résistance, c'est le pillage, le viol et la mort de nombreux habitants. Le général qui a de l'autorité sur ses troupes peut limiter le désastre, mais il doit souvent récompenser ses soldats par un butin également réparti. La bravoure et le patriotisme se double donc de la perspective d'un enrichissement rapide. Mais les revendeurs de butin sont là aussi (cf livius6.htm)
  4. Les prodiges ont comme principal but de faire respecter la religion. Valère Maxime nous montre le Sénat, ou la famille du coupable qui se charge de rapporter et de replacer avec exactitude les objets volés à la divinité.

Ira et rabies Latinorum, quia nec Romanos bello laedere nec Volscos in armis retinere potuerant, eo erupit ut Satricum urbem, quae receptaculum primum eis aduersae pugnae fuerat, igni concremarent.
La colère et la rage des Latins de n'avoir pu ni causer du tort aux Romains par la guerre, ni retenir les Volsques en armes, se déchaîna au point qu'il brûlèrent complètement la ville de Satricum, qui avait été leur premier refuge après [cette] bataille malheureuse.
sum est habituellement interprété dans le sens du français avoir. On voit ici que la nuance est différente. Remarquer tout de même que le français utilise là un adjectif possessif. quia développe ira et rabies : on voit qu'une causale peut dépendre d'un nom. Satricum est à env. 70 km au sud de Rome, en bordure des Marais Pontins.

nec aliud tectum eius superfuit urbis, cum faces pariter sacris profanisque inicerent, quam Matris Matutae templum ;
et comme ils lançaient des torches sur les bâtiments sacrés aussi bien que profanes, aucun ne survécut dans la ville, hormis le temple de Mater Matuta ;
Eloignement de aliud et de quam, qui réserve au nom de la déesse une place privilégiée dans la phrase ; l'énormité du sacrilège est symbolisée par l'adverbe pariter : ils ne font pas la différence entre sacré et profane ; profanis a ici son sens premier de pro fano « devant, à l'extérieur de l'espace sacré ». Mater Matuta est la déesse de l'Aube et de l'enfantement. Après l'assimilation du panthéon grec, elle désigne Ino.

inde eos nec sua religio nec uerecundia deum arcuisse dicitur sed uox horrenda edita templo cum tristibus minis ni nefandos ignes procul delubris amouissent.
et ce ne fut dit-on ni leur propre crainte religieuse, ni le respect des dieux qui les en empêchèrent, mais une voix épouvantable sortie du temple, les menaçant de châtiments funestes s'ils n'éloignaient leurs feux loin du sanctuaire.
L'événement extraordinaire sert ici à prévenir d'autres actes d'impiété. Un chapitre de Valère Maxime collectionne les exemples d'impiété punie par des châtiments en chaîne. la conjonctive ni... amouissent est elle aussi construite à partir d'un nom, minis, ce qui est moins fréquent en français : la promesse que... , l'espoir que... , la constatation que..., mais peut-être pas la menace que si...