Le papyrus : la plante, le papier et sa conservation

    Voici la traduction de M. Ajasson de Grandsagne, parue chez Panckoucke en 1831. Elle est donnée à titre indicatif, mais force le respect dû au colossal travail que représente cette entreprise.
    Le papyrus croît dans les marais d'Egypte ou dans les eaux dormantes du Nil, lorsque, débordées, elles demeurent stagnantes dans des creux qui n'ont pas plus de deux coudées de profondeur. La racine est grosse comme le bras, et tortue. Sa tige, triangulaire, ne s'élève pas à plus de dix coudées, va en diminuant jusqu'à son extrémité, où elle jette un bouquet semblable à un thyrse, mais qui ne contient point de graine, et ne sert qu'à faire des guirlandes pour les dieux.
(...)On prépare le papier en divisant avec l'aiguille l'écorce de l'arbre en feuilles très minces, mais aussi larges que possible : la couche la plus voisine du coeur de l'arbre est la meilleure, les autres valent moins à mesure qu'elles s'en éloignent.
(...)Tous les papiers se fabriquent sur une table mouillée de l'eau du Nil ; car, comme cette eau est trouble, elle tient lieu de colle. D'abord, sur la table inclinée, l'on range des bandes de papyrus aussi longues qu'on peut les avoir ; on les rogne de chaque côté, et on en place ensuite d'autres, qui forment une couche transversale ; puis on les soumet à la presse, et on les sèche au soleil, après quoi on les réunit en feuilles. Les feuilles extérieures sont toujours les meilleures, et la qualité diminue vers le centre. Jamais la main n'en contient plus de vingt.
(...)
Les aspérités du papier disparaissent par l'emploi de l'ivoire ou de la coquille, mais l'écriture dure moins longtemps : le papier, bien plus luisant alors, ne prend pas si bien l'encre.
(...)
Le papier étant collé, on l'amincit avec le marteau, ensuite on le colle de nouveau ; et, pour faire disparaître les plis qui se reforment, on l'étend une seconde fois sous le marteau. C'est sur ce papier que depuis si longtemps Tiberius et Caius Gracchus ont écrit de leur propre main leurs mémoires, dont j'ai vu, environ deux siècles après, l'autographe chez Pomponius Secundus, citoyen et poète illustre. Cicéron, Auguste et Virgile s'en servaient aussi, et nous avons vu nombre de fois leurs manuscrits.